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L’île de Pâques, petite perle perdue au beau milieu du Pacifique, quasi à mi-distance entre Santiago et Tahiti, soit à environ 4h30 d’avion de ses voisins. La vue des premières falaises qui tombent dans l’océan depuis l’avion nous donne déjà des frissons : on va enfin pouvoir découvrir cette terre de légendes et de mystères. Rapidement on cherche des yeux le premier moai, on croit en apercevoir un lors de l’atterrissage. Dès l’aéroport le dépaysement est là, on n’est plus au Chili mais bien sur une île du Pacifique avec une culture qui se rapproche plus de la Polynésie : toits en feuilles de palmiers, colliers de fleurs à l’arrivée, chaleur tropicale qui flotte dans l’air,…

Pour notre séjour sur l’île on a décidé de camper, et quel camping, vue sur l’océan. On est heureux de retrouver notre “mer”, comme on dit chez nous, ça nous avait bien manqué ! L’eau est turquoise, les vagues sont belles, un peu trop d’ailleurs, elles s’écrasent sur les rochers avec force. Rapidement on aperçoit les premières tortues à deux pas du bord, mais le courant et la puissance des vagues nous empêchent de nous en approcher de très près. On profitera quand même du spectacle en regardant les poissons avec nos masques et tuba, et les tortues n’ont qu’à bien se tenir, on est décidés à revenir un jour plus calme.

Le lendemain on part faire une belle balade le long de la côte nord. On croise pour la première fois le chemin de vrais moais : impressionnantes statues de pierre au visage typique dressés dos à l’océan. D’ailleurs la première surprise est là : les moais ne se ressemblent pas comme on pourrait le croire au premier coup d’œil, ils ont bien chacun des visages et des expressions différentes. Comment ces mastodontes de roches ont-ils pu être amenés là et pourquoi ? Les hypothèses sont multiples mais le mystère demeure. Même si une partie des moais a été restaurée, il y en a encore beaucoup qui gisent au sol, brisés ou face contre terre, ce spectacle nous crée un petit pincement au cœur.

Notre promenade du premier jour nous conduira dans plusieurs grottes façonnées par la lave lors de la création de l’île. Son origine volcanique est partout : avec ses rochers faits de figures de laves figées et ses cratères multiples qui dessinent les contours de l’île. La force de la nature nous impressionne encore et on la ressent partout ici.

Le troisième jour, on loue un scooter pour explorer les coins les plus éloignés de l’île. Les sites de moais défilent le long de la côte est, la plupart sont à terre, et nous conduisent jusqu’au volcan Ranu Raraku, la nurserie des moais. Là le spectacle est à couper le souffle : des centaines de moais sont éparpillés le long du flanc du volcan , comme sortis de terre. C’est la carrière où était taillés les colosses et un bon nombre y sont toujours : soit encore à moitié figés dans la roche, soit cassés sur le sol ou bien simplement plantés là : un vrai champs de moai. Du haut du volcan on l’aperçoit enfin : le site de Tongariki, le plus connu car 12 moais ont été restaurés et se dressent fièrement alignés dos à la mer. Le spectacle est saisissant : tels des gardiens des terres sacrés, ils semblent encore veiller.

On part ensuite se baigner sur la petite plage d’Anakena, la plus connue de l’île avec ses palmiers et son sable rosé. La baignade est de courte durée car le temps nuageux ne s’y prête pas vraiment. C’est finalement la pluie qui nous accompagnera lors de notre dernière visite : la carrière des chapeaux des moai. Ces chapeaux ronds et de pierre rouges coiffaient autrefois toutes les statues maintenant on ne peut les observer que sur un petit nombre.

On a bien fait d’en profiter ces deux premiers jours car notre chance avec le temps a fini par tourner et c’est la pluie qui nous accompagnera pour la fin de notre séjour. Cette satané pluie, on s’en était bien passée jusque là ! Car mine de rien quand la brume enveloppe la mer et les sommets des volcans, que les chemins se transforment en torrent de boue et que l’humidité nous gèle les os, ça fait perdre un peu de son charme à l’île. Le premier jour on accepte et on en profite pour faire ce qu’on a jamais le temps de faire : écrire des articles. Le deuxième jour on accepte (on n’a pas le choix de toute façon ! ) mais on voit nos rêves d’évasions se restreindre et la nostalgie commence à gagner.  En fin de journée au diable, on enfile nos manteaux et nos pantalons antipluie et on part braver la tempête : on n’est pas breton pour rien quand même ! Et là le miracle se produit, au milieu des nuages gris, un rayon de soleil dessine de magnifiques arc en ciels  sur les rochers et dans le ciel. Etonnamment la mer est plutôt calme près du port et on se jette à l’eau pour retrouver les tortues aperçues deux jours plus tôt. A peine les chevilles mouillées, une énorme tortue curieuse s’approche pour jouer avec nous, la magie de l’île scintille de nouveau dans l’air. Quelques brasses plus loin et on croise le chemin d’autres tortues qui nagent paisiblement dans l’eau turquoise. Le soir on a enfin la chance d’observer un magnifique coucher de soleil sur l’océan, juste en face de notre tente.

Après s’être arrêtée toute la nuit, la pluie reprend de plus belle le lendemain… C’est notre dernier jour, on n’a pas le choix, on s’équipe contre la pluie et part à l’ascension du volcan Ranu Kau pour aller visiter le village sacré d’Orongo. Finalement on a eu un peu de chance dans notre malchance car ce jour là n’était pas si pire et on a pu marcher au sec une bonne partie de la rando. En plus le site fermés les autres jours et le matin même du fait du mauvais temps était ouvert pour nous quand on y est arrivés. Le village traditionnel a été construit entre le cratère du volcan et les falaises avec de petites maisons basses arrondies qui font face à l’océan. La porte d’entrée est minuscule, surement pour s’abriter du vent au maximum mais on se demande comment les gens qui vivaient là faisaient pour se glisser dans l’ouverture ! Ce village était un lieu sacré à l’époque et tous les ans les pascuans se retrouvaient là pour choisir leur nouveau roi entre les différents chefs de tribus. Il n’était pas question d’élections mais d’une course en mer pour rejoindre le petit îlot en face, trouver en premier un œuf d’oiseau (qui venaient se reproduire tous les ans ici) et le ramener au village. Ainsi la première tribus à ramener un œuf de Manutara (hirondelle de mer) faisait élire leur chef roi de l’ile jusqu’à la prochaine course l’année d’après. On rentre pleins de boue mais heureux et en guise de bain rien de telle qu’une petite baignade avec nos copines tortues sous la pluie !

Le lendemain on quitte notre petit îlot de bonheur sous une pluie torrentielle. La pascuane qui nous accompagne à l’aéroport nous apprend que ce temps là est exceptionnel pour l’île. Normalement la saison des pluies est aux mois de mai / juin et à cet époque de l’année il ne pleut jamais plus de 10 minutes d’affilée ! En guise d’adieu on reçoit un collier orné d’un moai pour nous rappeler notre séjour sur l’île et la gentillesse de ses habitants.